Idsworth Valley : une église solitaire et des villages figés dans l’histoire

Il y a des endroits comme Idsworth Valley, qu’on découvre un peu par hasard et qui finissent par devenir des repères. 

St Hubert’s Church, nichée en pleine campagne dans la vallée d’Idsworth, à une quinzaine de minutes de voiture de chez nous, en fait partie.

La première fois qu’on y est allés, c’était un jour de printemps. Vous savez, ce genre de matinée où l’air est encore frais mais où on sent déjà la promesse d’une journée douce.

On voulait juste s’éloigner un peu de l’agitation urbaine de Portsmouth, prendre un bol d’air.

Et puis, au détour d’un chemin, elle était là : une petite église isolée en plein champ, comme sortie de nulle part.

Depuis, on y est retournés plusieurs fois, en été, en automne... toujours avec cette même impression : être face à un vestige du passé, figé dans le temps.

St Hubert’s Church : une église perdue dans un champ

Depuis les fenêtres du train reliant Londres à Portsmouth, les passagers aperçoivent cette petite église solitaire posée au milieu des champs, près de Rowlands Castle, et ne peuvent s’empêcher de se demander quelle est son histoire.

À l’origine, cette petite église était dédiée à Saint Pierre.

Reconstruite au Xe siècle, elle servait alors une importante communauté agricole installée dans les bois environnants.

Après la conquête normande, son rôle évolua : Idsworth devint une paroisse indépendante et l’église devint celle du manoir.

Durant tout le Moyen Âge, elle fut administrée par l’Église catholique romaine, fonctionnant comme une chapelle indépendante dépendant de St Michael’s à Chalton.

Difficile d’imaginer que cet endroit a été, autrefois, le centre d’un village aujourd’hui disparu.

Pourtant, il y a plus de mille ans, Idsworth était une petite communauté anglo-saxonne bien vivante. 

Son église, construite aux alentours de 1053, était au cœur de la vie du village.

Mais la peste noire et les bouleversements du Moyen Âge ont eu raison de la population.

Peu à peu, les maisons ont disparu sous la terre, englouties par l’histoire et les labours.

Seule l’église est restée. Seule, mais debout.

C’est à l’un des hommes les plus puissants d’Angleterre, Earl Godwin de Wessex, père du célèbre roi Harold (oui, celui qui a pris une flèche dans l’œil à la Bataille d'Hastings...), qu’on doit probablement sa construction. 

Ce n’est donc pas une simple église de campagne : c’est un morceau d’histoire anglaise planté là, au milieu des collines.

Les boxes en bois

En observant la nef, un détail inhabituel interpelle : les boxes en bois qui encadrent les bancs.

Ces compartiments clos, typiques des églises rurales anglaises des XVIIe et XVIIIe siècles, avaient une fonction bien précise : ils permettaient aux familles de notables de la paroisse d’avoir leur propre espace réservé pendant les offices.

À une époque où l’église était non seulement un lieu de culte mais aussi un marqueur social, ces boxes reflétaient la hiérarchie de la communauté.

Aujourd’hui, ils offrent un aperçu fascinant de l’évolution des pratiques religieuses et du mode de vie des villageois d’antan.

Nous avons également observé d'autres boxes en bois dans l'église de West Meon (Meon Valley).

Un trésor caché : les fresques médiévales

Mais un événement marquant changea son destin en 1864 : la redécouverte d’une fresque médiévale, que l’on pensait représenter la conversion de Saint Hubert, le saint patron des chasseurs.

En effet, ce qui rend St Hubert’s encore plus fascinante, ce sont ses peintures murales du XIVe siècle.

Imaginez : pendant des siècles, elles étaient là, cachées sous des couches de badigeon posées à l’époque de la Réforme.

Jusqu’en 1864, quand un certain Reverend J. Astley a décidé de faire tomber le masque.

Le résultat ? Un témoignage rare de l’art religieux médiéval.

Ce n’est pas juste une décoration, c’est une histoire en images, destinée à enseigner aux fidèles qui, pour la plupart, ne savaient pas lire.

On y voit Saint Jean-Baptiste, mais aussi Saint Pierre et Saint Paul, postés de chaque côté de la fenêtre est.

Pierre tient ses clés, Paul brandit un livre et une épée.

Et puis, il y a cette scène qu’on pensait être Saint Hubert, et qui a valu à l’église d’être rebaptisée.

En réalité, il semble bien que ce soit encore une référence à Saint Jean-Baptiste.

Oups. Trop tard pour changer le nom.

Ce qui frappe, quand on se tient là, c’est l’atmosphère. Il n’y a plus de village, plus d’habitants, juste ces fresques qui racontent une histoire à un public disparu.

C’est à la fois fascinant et un peu troublant.

La fresque de l'an 2000

En plus des fresques médiévales, un autre élément artistique attire l’attention à St Hubert’s Church : une fresque moderne réalisée en l’an 2000.

Installée pour célébrer le nouveau millénaire, cette œuvre contemporaine cherche à réinterpréter l’esprit des peintures murales anciennes tout en ajoutant une touche moderne à l’église.

Elle offre une vision colorée et vivante qui contraste avec les fresques médiévales plus effacées par le temps, rappelant ainsi que ce lieu, bien que chargé d’histoire, reste un espace vivant de culte et de mémoire.

Pour en savoir plus sur l'église de Idsworth, visitez ce site [en anglais].

Idsworth Valley et ses villages : un voyage hors du temps

St Hubert’s Church ne serait pas aussi spéciale sans son environnement.

La vallée d’Idsworth, c’est ce paysage typiquement anglais, fait de collines ondulantes, de prés et de petits villages figés dans le temps.

Finchdean, Chalton, ces noms évoquent des histoires de marchands, de contrebandiers et de paysans qui ont foulé ces terres bien avant nous.

Nos balades dans la vallée

On a fait plusieurs randonnées dans la région, parfois au départ de Chalton, parfois de Finchdean.

Chaque balade dans la Idsworth Valley révèle quelque chose de différent : une vieille ferme en pierre aux murs usés par le vent, un sentier bordé de haies sauvages, une vue imprenable sur la mer et la vallée depuis un petit plateau caché.

Il y a aussi ce pub centenaire, The George, à Finchdean, où l’on peut encore entendre les habitués raconter des anecdotes du village autour d’une pinte.

Chalton, quant à lui, abrite The Red Lion, probablement l’un des plus anciens pubs du Hampshire. 

Il date du XVIe siècle et son atmosphère, avec ses poutres apparentes et son immense cheminée, nous transporte directement quelques siècles en arrière.

L'église de Chalton

Le village possède aussi une église médiévale et une histoire fascinante liée aux messagers de la ligne télégraphique de l’Amirauté britannique.

La cabine téléphonique de Finchdean

À Finchdean, il y a un petit détail qui nous a amusés plus que prévu : une cabine téléphonique rouge, typiquement anglaise.

Rien d’exceptionnel, en apparence. Sauf qu’elle fonctionne encore !

Impossible de résister, il fallait l’essayer.

Entre fous rires et essais improvisés, on a joué avec comme si c’était une relique d’un autre temps.

Pour ma fille de 11 ans, c’était une première : jamais elle n’avait passé un coup de fil depuis une cabine téléphonique.

Voir son air intrigué en composant le numéro, entendre le bip familier du combiné... Un petit moment hors du temps, au milieu de ce village figé dans le passé.

Conseils pratiques pour visiter Idsworth Valley

Si vous êtes tentés par une visite, sachez que l’église Saint Hubert de Idsworth est ouverte tous les jours (de 9h à 18h en été, 9h à 16h en hiver).

Pour se rendre dans la vallée, la voiture reste le plus simple, mais il est possible de venir en train via la gare de Rowlands Castle, puis de marcher 10k aller-retour pour atteindre l'église Saint-Hubert de Idsworth.

Les sentiers balisés traversent de magnifiques paysages et permettent d’apercevoir des chevreuils ou des faisans au lever du jour.

L’un des itinéraires les plus agréables relie Chalton à Finchdean en longeant les collines, offrant des panoramas splendides sur le South Downs National Park.

Conclusion : Une immersion dans l’histoire et la nature anglaise

St Hubert’s Church, c’est plus qu’un simple monument historique.

C’est un voyage dans le temps, une bulle hors du monde où l’on peut toucher du doigt l’Angleterre médiévale, ressentir la présence des générations passées, et contempler l’histoire dans toute sa fragilité.

Alors, si un jour vous passez dans le coin, prenez le temps de vous arrêter.

Suivez le sentier, traversez le champ et poussez la porte en bois de St Hubert’s Church. Vous ne le regretterez pas.